Le DGD constitue un tout unique, indivisible et en principe intangible lorsqu’il acquiert un caractère définitif.
C’est une bonne et une mauvaise nouvelle. Tout dépend du coté où l’on se place en surtout du contenu du DGD.
Dans tous les cas c’est un barrage qui ne donne pas droit à l’erreur.
Tu vois toute l’importance de la première partie de cet article parue la semaine dernière.
Selon tes intérêts et le contenu du décompte général, tu as 2 possibilités d’actions :
- Agir tant qu’il est temps et de manière méthodique (réclamation).
- Ne pas agir, en connaissance de cause, de manière tactique et stratégique (erreur à ton avantage détectée).
Quelle que soit ta stratégie, tu ne pourras que dans de très rares possibilités revenir sur ton choix. Le DGD par son effet barrage ne t’offrira pas/peu de seconde chance.
La jurisprudence est très importante sur la contestation du DGD. Tu trouveras dans cet articles de nombreuses références à des arrêts. Cela te permettra d’estimer quelles sont tes chances de succès en cas de contentieux si tu y es confronté.
Le DGD : un barrage à toute contestation ultérieure
DGD ami en cas d’oubli de l’acheteur public en ta faveur
Dans ce cas là, tu as 2 choix, tu indiques son erreur à l’acheteur public ou tu ne fais rien.
Je pense que ta décision sera fonction de la manière dont s’est passé l’exécution du marché et le degré de partenariat que vous avez construit ensemble.
Dans tous les cas, l’acheteur public ne pourra pas te reprocher de ne pas avoir relevé son erreur dans les futures consultations.
A déjà été refusé la remise en cause d’un DGD pour :
- Une omission de pénalités (CAA Bordeaux 4 décembre 2018, Département du Lot, req. n° 16BX00805).
- en cas de réception des travaux avec réserves. Une telle reception ne fait pas obstacle au déclenchement des délais donnant naissance à un décompte tacite (CAA Versailles 27 février 2020, Sté Ateliers Bois, req. n° 19VE01401).
L’acheteur public a l’obligation d’établir un DGD même en cas de réserves à la réception. S’il laisse passé le délai, le DGD peut être tacitement établi.
Attention néanmoins aux dispositions précisées dans le CCAP (cf. précédent article sur l’établissement du DGD). L’acheteur public peut tout à fait prévoir que le DGD ne sera établit qu’une fois la dernière réserve levée.
De la même manière, sauf dispositions contraires dans le CCAP, le DGD sera établit tacitement une fois le délai écoulé.
Par conséquent, à défaut d’avoir mentionné dans le DGD les sommes correspondantes à la levée de ces réserves, ou à tout le moins à une estimation de ces sommes, le caractère définitif du décompte général aura pour effet de lui interdire toute réclamation correspondant à ces sommes (CE 20 mars 2013, Centre hospitalier de Versailles, req. n° 357636).
- L’opposition expresse de l’acheteur public au projet de décompte final et au mémoire de réclamation qui l’accompagnait ne peut empêcher l’intervention tacite du décompte général et définitif (CAA Nantes 30 mars 2020, Communauté d’agglomération du Pays de Dreux, req. n° 19NT03454.)
DGD ennemi en cas d’oubli de ta part ou d’une erreur de l’acheteur public en ta défaveur
Dans ce cas, le caractère intangible du DGD apparait beaucoup moins sympathique. Il faut contester par le mémoire en réclamation dans les temps, sinon, c’est perdu.
Ne peut fonder la remise en cause d’un DGD :
- Des erreurs de calcul des révisions des prix (CE 8 février 1989, Opac Meurthe et Moselle, req. n° 85475)
- L’omission d’appliquer la clause de révision des prix sur l’ensemble des situations de travaux « doit être regardé comme un abandon de créance » (CAA Douai 2 avril 2020, Société ICP, req. n° 18DA01228)
- L’omission des intérêts moratoires dus en cas de dépassement du délai de paiement d’acomptes. Ils « constituent des éléments de créance trouvant leur cause dans l’exécution du marché » nous dit le juge.
✅ Par conséquent, le titulaire doit les avoir intégrés à son projet de décompte final « dans leur principe ou dans leur montant », si à la date où il l’établit il est possible de « déterminer le retard sur la base duquel les intérêts moratoires doivent être liquidés ».
✅ Si tel est le cas, la somme correspondant à ces intérêts moratoires peut être accordée en référé provision (CAA Marseille 26 mai 2020, Commune de Roquefort la Bédoule, req. n° 20MA00644).
Quelques exceptions où le DGD ne fait pas barrage
Les rares cas de révision du DGD
Peut justifier la révision du DGD :
- Un cas de fraude ou de dol,
Je ne développe pas ce cas très exceptionnel.
- Un cas « d’erreur, d’omission ou de présentation inexacte » prévus à l’article 1269 du code de procédure civile,
Le cas le plus courant qui amène les parties devant le juge est la survenance d’une erreur dans le contenu du décompte général devenu définitif. Comme on l’a vu dans les paragraphes précédents, l’omission ou l’erreur de calcul n’ouvrent pas droit à la révision du DGD. Le juge regarde les circonstances de l’espèce et bien malin celui qui pourra dire à l’avance comment sera qualifiée l’erreur.
Si on tente de démontrer l’erreur, elle doit consister en une erreur matérielle qui relève de l’évidence.
Le juge procède à une interprétation stricte de cette notion.
- L’accord des parties.
Le caractère définitif du décompte général n’est pas d’ordre public. Cela signifie que la volonté des parties peut y déroger. Dans ce cas, pas de contentieux, cela se règle simplement. Les parties modifient le DGD d’un commun accord.
Application des intérêts moratoires afférents au solde résultant de ce DGD.
J’évoque rapidement ce cas pour éviter toute confusion. En cas de retard de paiement du solde résultant du DGD, il va sans dire que le calcul des intérêts moratoires s’applique de droit.
Lorsque l’entreprise titulaire met en demeure l’acheteur public d’établir le DGD, cette mise en demeure constitue un mémoire en réclamation. Le délai de paiement du solde doit être regardé comme ne commençant à courir qu’à compter de la reception de cette mise en demeure par l’acheteur public.
Il en va différemment si la mise en demeure fixe un délai à l’acheteur pour l’établissement de ce DGD. Dans ce cas c’est bien le lendemain de fin du délai indiqué qui constituera le point de départ du calcul des intérêts moratoires.
Recevabilité de L’appel en garantie de l’acheteur public contre l’entreprise malgré la signature du DGD
À la suite d’une action indemnitaire dirigée par un constructeur contre le maître de l’ouvrage, ce dernier a la possibilité d’appeler en garantie un autre constructeur (maître d’œuvre ou titulaire d’un autre lot par exemple), alors même que le décompte de son marché serait devenu définitif.
C’est le sens de la jurisprudence Commune de Dijon (CE, 15 nov. 2012, n° 349107)
L’acheteur public ne pouvait pas prévoir, lors de la signature de ce document, que le comportement du co contractant allait aboutir à la mise en jeu de sa responsabilité.
Il s’agit de la prise en compte du critère de l’imprévisibilité.
- L’appel en garantie de l’acheteur public est recevable en dépit de la signature du décompte.
- À moins qu’il ne soit établi qu’il avait connaissance de l’existence du litige à l’origine de sa condamnation avant l’établissement du décompte et, dans cette hypothèse, qu’il n’y ait pas ajouté une réserve.
En effet, si l’acheteur public avait connaissance de l’existence du litige lors de l’établissement du décompte général du marché de l’appelé en garantie, il n’y a plus d’imprévision.
Dans ce cas, il perd définitivement la possibilité d’obtenir du constructeur la réparation du préjudice qu’il peut subir, même si celui-ci apparaît après l’établissement du décompte (CE, 19 nov. 2018, n° 408203, INRSTEA)
A contrario, comme souvent en droit, s’il savait mais qu’il a fait preuve de diligence en émettant des réserves en lien avec les sommes réclamées dans le DGD, il conservera la possibilité d’appeler en garantie son cocontractant.
La réserve, en lien bien entendu avec le litige, sauve donc l’acheteur public des conséquences de la connaissance du manquement.
En ce sens, CE, 6 nov. 2013, n° 361837, Région Auvergne et plus récemment CE, 6 mai 2019, n° 420765, Société Icade Promotion
La retenue de garantie ne peut être imputée sur le DGD
Les sommes prélevées au titre de la retenue de garantie n’ont pas à être imputées sur le solde de rémunération dû à l’entreprise (CAA Lyon, 18 févr. 2010, n° 07LY01299, SA Planche)
Elles peuvent être utilisées pour le financement des reprises de malfaçons couvertes par la garantie contractuelle, et ce jusqu’à l’expiration de la garantie de parfait achèvement, c’est-à-dire après le règlement du marché.
La retenue de garantie peut être mobilisée pour faire exécuter par un tiers, aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant, les travaux de reprise que celui-ci se serait refusé à exécuter.
Si tu souhaites en savoir plus sur mes offres de formations et les thèmes abordés, n’hésite pas à me contacter via le formulaire de contact.
Un groupe Facebook est à ta disposition pour échanger, poser des questions et rencontrer d’autres entrepreneurs qui sont dans la même dynamique que toi ! Nous pourrons échanger de manière plus directe sur les thématiques qui t’intéressent